C’est un moment très particulier.
Une bascule, un vertige, une évidence, une douleur brutale, intense et sans compromis.
Elle doit partir. Se lever, dire au-revoir, vite. Prendre ses affaires, s’enfuir, presque, au risque d’étouffer, de s’étouffer.
C’est à l’occasion d’un diner, d’une fête, au bureau, chez elle, même parfois, lorsque trop de monde à son goût il y a.
Ce moment où, soudainement, elle veut, elle doit être seule.
Ce moment où elle se sent dépassée, vidée de toute énergie.
Où elle ne supporte plus les bruits, les efforts qu’elle doit faire. Où elle ne supporte plus les autres, quels qu’ils soient.
Elle est introvertie. Vous la connaissez déjà, elle a commencé à raconter son histoire ici → Confessions d’une introvertie – Prologue.
Elle commence à bien le connaître ce moment si particulier. Celui où la solitude l’appelle irrésistiblement. Sa Précieuse, sa divine solitude. Elle redevient animal solitaire et rien ne l’arrêtera jusqu’à ce qu’elle ait quitté le monde bruyant.
Si on l’empêche de partir, si les adieux prennent trop de temps, elle devient comme panthère en cage. Elle tourne en rond, s’énerve, s’agace, s’impatiente. Qu’a-t-elle de si urgent à faire ? Se retrouver.
Ils ne comprennent pas son état, prennent horriblement leur temps, son temps. Ils parlent, parlent, parlent. Ou, pire, ne disent rien mais ne bougent pas. Elle doit agir, s’extraire de ce monde pour entrer dans le sien.
ELLE. DOIT.PARTIR.
Tant pis pour les politesses, les bienséances. Tant pis pour eux, elle les retrouvera plus tard, ils auront oublié.
Seule, enfin.
Elle ressent cet incroyable soulagement, cette ivresse que l’on obtient en gravissant un sommet sans fin.
Elle savoure. Le temps semble en suspension, elle écoute chaque silence. Pour l’instant, elle ne fait rien, en apparence. Elle recharge ses batteries.
Dans quelques instants, elle se plongera dans un livre, une bonne série ou un bain revigorant. Mais pour l’instant, elle accueille le néant.
Elle ne fait rien d’extraordinaire et pourtant ces instants sont extra-ordinaires…
Elle imagine le monde, dehors, rapide, stressé, bruyant, fatiguant.
Elle sait que c’est un peu ça le bonheur, son bonheur. Passer d’ensemble à seule, en sachant qu’elle pourra retrouver les autres, lorsqu’elle voudra, lorsqu’elle sera à nouveau prête.
Elle profite. 5 minutes, 2 jours, 1 mois, peu importe, du moment qu’elle peut voler ces moments de solitude essentiels à sa survie, à sa vie, à son âme créatrice.
Parfois, il lui suffit même de fermer une porte. La voici dans cette petite pièce, ce jardin, elle entend le brouhaha au loin, elle l’accepte, on peut même dire qu’il la rassure. Seule sans être seule.
Elle pense à tous ceux qui sont comme elle. Qui doivent partir.
‘Là, maintenant tout de suite ?‘ Oui
‘Non reste, on s’amuse bien.‘ Plus moi.
‘T’es vraiment pas marrant.‘ Si, mais pas là.
Ceux qui sont accueillants mais ne supportent pas que cela dure trop longtemps. Envahis.
Ceux que l’on ne comprend pas, qu’on regarde parfois bizarrement.
Ceux à qui on dit « Comment, tu aimes être seul ? Moi, je déteste ça !!!! »
Elle pense à eux, ils savent se reconnaître. Instinct. Ils se comprennent. Pas besoin de s’expliquer, de se justifier.
Elle n’a pas peur d’être seule, jamais ou presque. Elle ne voudrait pas l’être en permanence mais si elle avait à choisir entre les deux extrêmes, elle sait que c’est la présence d’autres qui finirait par la rendre folle. Pas elle-même.
Elle n’est ni froide, ni indifférente. Elle n’est ni timide, ni renfermée.
Elle est juste comme ça.
Céline
2 février 2016J’ai lu ton article en commençant par la fin avec la magnifique BO en bande son… sais-tu que tes articles se lisent aussi de la fin au début ? Nous les solitaires avons un monde tellement grand en nous qu’on peut paraître à contre-courant. Des fois on l’est. Mais, je crois que nous avons tous à rayer le mot « normalité » de notre vocabulaire. Etre soi c’est un métier à temps plein 🙂 Et quel soulagement de s’accepter et s’aimer comme on est. Merci Morgane.
Morgane
2 février 2016Mais oui, c’est vrai il se lit aussi à l' »envers », je n’avais jamais réalisé ! ça doit être mon côté musicienne 😉 Merci, je savais que cela te parlerait, comme à beaucoup de mes lecteurs d’ailleurs, je pense.
Morgane
2 février 2016Exactement ! J’en profite pour conseiller à mes adorables lecteurs zé lectrices la lecture de ton blog, notamment le dernier billet qui m’a mise en joie –> http://www.lesaventurieres.com/2016/02/01/dire-non-arreter-de-faire-plaisir-a-tout-le-monde/
Lyvia
2 février 2016Morgane, étais-tu posée sur mon épaule le jour où, fin décembre, je me suis retrouvée dans un centre commercial parisien bourré de lumière artificielle, avec toute ma famille pour acheter des cadeaux de Noel de dernière minute, et où j’ai commencé à dire ‘j’étouffe, j’étouffe’ tellement la foule m’insupportait et que je suis partie en laissant tout le monde en plan ? -« Mais tu vas où ? » « Chez moi !! » « Ah, ok ».
Voilà. On m’a regardé un peu bizarrement, mais bon, j’ai fait des bisous, j’ai dit des ‘pardon’, des ‘désolée’. Je ne suis même pas repassée par les souterrains pour aller au métro, j’ai préféré marcher dehors jusqu’à l’entrée qui me laisserait le moins longtemps sous le sol. Ah, je ne comprends pas qu’on puisse rester des heures entourée de bruits et de lumière. Mais il est fort probable qu’on ne me comprenne pas quand je fuis 🙂 All is good! Merci, je sais que je ne suis pas seule.
Morgane
4 février 2016AH, l’horreur des centres commerciaux et autres lieux de « foule »…
Juste Un Mec
11 février 2016C’est comme si quelqu’un venait d’entrer dans ma tête. Superbe article ! Très juste, très bien écrit. Merci.
Morgane
11 février 2016Merci à vous et merci de m’avoir fait découvrir votre très joli blog…
borie
20 février 2016Tu ne serais pas ma jumelle par hasard ??? 😉
Morgane
21 février 2016Absolument. Mais pas par hasard du tout ^_^
Morgane
21 février 2016Merci Nadège, bon voyage dans ton monde 🙂
Morgane
21 février 2016Ah oui, j’adore faire ça, observer le monde comme de l’extérieur. So good !
Morgane
22 février 2016Merci Cécile pour ton témoignage d’énergie extravertie 😉 En ce qui me concerne, j’aime la solitude entourée, c’est-à-dire savoir qu’il y a du monde si j’ouvre la porte. D’où mon goût prononcé pour les villes. J’adore la mer aussi, il me faudrait une ville maritime en fait ah ah.
Une chose est sûre, comme tu le dis nous ne sommes pas dans des cases : nous nous promenons sur une échelle qui va de la solitude totale à la foule. Nos besoins en ressourcement varient selon de nombreux critères. Comme toi, j’aime les interventions en public, mais elles me vident et j’aime encore plus le moment où je me retrouve seule, juste après…
Pénélope
21 mars 2016Qu’il est bon de te lire et de me reconnaitre ici, merci !
Julie lit au lit
5 juillet 2016Je suis une introvertie sociable. Je me ressource en solo, dans la tranquillité. Et j’aime aller à la rencontre des gens. Ceux qui me connaissent peu pensent que je suis extravertie. Et pourtant! Si j’ai à faire un choix, tout comme toi, je préfère être seule. Il est rare que je me tombe sur les nerfs!
Morgane
5 juillet 2016Etre avec soi, quel bonheur 🙂